Shigeru Mizuki, contes d’une vie fantastique
À l'occasion du centième anniversaire de sa naissance, le Festival d'Angoulême organise une grande rétrospective autour de l'œuvre de Shigeru Mizuki. L'occasion de découvrir le travail de cet artiste décisif au destin romanesque, qui s'est notamment illustré par ses récits de guerre et ses mangas d'horreur.
En 2006, le public français découvre Shigeru Mizuki grâce à NonNonBâ (Éditions Cornélius), un récit racontant la vie d'une vielle femme superstitieuse obsédée par les yõkai. L'année suivante, le manga obtient le Prix du Meilleur Album au Festival d'Angoulême. Son auteur a 85 ans, et se réjouit de voir que ses histoires de monstres et de fantômes touchent encore le cœur du public.
Né en 1922 à Sakaiminato, petite ville côtière du sud-ouest du Japon, Shigeru Mura, alias Shigeru Mizuki, est très tôt fasciné par le dessin. Il a la chance d'avoir son père qui l'incite à persévérer dans cette voie. Malheureusement, la guerre vient tout gâcher. À vingt ans, il est mobilisé par l'Armée impériale japonaise, puis envoyé dans la jungle de Nouvelle-Guinée où il va vivre un véritable cauchemar. Après avoir assisté à la mort de bon nombre de ses frères d'armes, il perd son bras gauche lors d'un bombardement et contracte bientôt la malaria. À son retour au Japon, il abandonne ses rêves de dessin et touche à tous les métiers pour survivre : poissonnier, taxi-vélo, dessinateur de kamishibai*. Surmontant ses traumatismes, il publie finalement son premier manga, Rocketman, en 1957.
Par la suite, Shigeru Mizuki va accompagner toutes les transformations de l'industrie du manga. Il est l'un des pionniers du manga d'horreur, se spécialisant dans les histoires mettant en scène des yõkai, ces créatures étranges issues du folklore fantastique local. Il est également connu pour ses récits qui dépeignent l'absurdité et la violence de la Guerre du Pacifique. Décédé en 2015, à l'âge de 93 ans, il laisse derrière lui une œuvre plurielle et incroyablement cohérente, où la petite et la grande Histoire s'entremêlent et où le fantastique contamine le quotidien dans un geste poétique.
*KAMISHIBAI Forme d’art populaire japonais qui consiste à faire défiler des panneaux peints comme des diapositives pour raconter une histoire.
Une expositions parrainée par SNCF.