52e ÉDITION – 30 janvier au 02 février 2025
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Revivez l'exposition Jeunesse chez vous

Le mythe 

Un mythe est un récit des origines. Il raconte comment quelque chose est né. Il renvoie donc à un temps ancien et éclaire les origines du monde, souvent avant l’apparition des hommes. Le mythe se distingue de la fable car il ne cherche pas à refléter la morale ou l’ordre naturel. Depuis l’Antiquité, la philosophie oppose le mythe au discours scientifique : le discours mythique dissimule des vérités que l’aventure doit révéler. Pour l’anthropologue Claude Lévi-Strauss, qui a étudié les mythes, ces récits reflètent moins la réalité que la structure de l’esprit humain : à travers les mythes, l’homme chercherait à comprendre le sens du monde et à résoudre le mystère de ses origines. 

C’est pourquoi le discours mythique est nécessaire : il permet de raconter les racines des différentes cultures et sociétés humaines pour en expliquer le fonctionnement. Yakari montre ainsi à quel point la société indienne s’est construite dans un rapport mystique à la nature et raconte pourquoi les rites sont primordiaux pour dialoguer avec l’environnement. Le mythe permet aux Sioux de comprendre quelque chose d’unique : le sens du monde qui les entoure. Hilda montre que le mythe témoigne aussi du besoin de trouver sa place dans un monde trop vaste ou trop étouffant : l’immensité des paysages naturels de l’Europe du Nord prend son sens lorsque la jeune fille comprend que des géants et des trolls vivaient là avant elle. L’important n’est pas la vérité scientifique, mais le besoin de trouver du sens dans la forme du monde. Les nombreuses figures mythiques que Hilda rencontre tout au long de la série et qu’elle répertorie dans des listes témoignent enfin du besoin de nommer et de classifier les espèces pour comprendre sa place au milieu d’elles.

La légende  

À l’inverse du mythe qui raconte les origines du monde, la légende témoigne de l’histoire des hommes, comme les légendes arthuriennes, situées au Moyen Âge. Le mot « légende » vient du latin legenda, qui signifie « ce qui doit être lu ». Il s’agit à l’origine d’un texte lu en public et qui raconte la vie d’un saint. Durant le XVIe siècle, le terme change de sens pour désigner un récit merveilleux mêlé à des éléments historiques dont la réalité a été largement déformée par l’imagination. 

Cet imaginaire est nécessaire pour créer une histoire qui mérite d’être racontée et marque fortement les esprits. Une phrase célèbre du film L’Homme qui tua Liberty Valance de John Ford résume cette idée : « Quand la légende dépasse la réalité, on publie la légende. » À travers ses histoires de monstres de toutes sortes, Petit Vampire transporte ainsi un jeune orphelin loin de sa réalité pour lui permettre de se sentir moins différent dans ce monde imaginaire. 

Le folklore

« Folklore » signifie « savoir du peuple ». Ce mot désigne les œuvres et les traditions collectives transmises de génération en génération. Le folklore indique donc que les hommes travaillent pour organiser l’héritage des histoires, mythes et légendes à l’origine de leur société. 

En fonction des époques, le travail du folklore a été étudié et parfois remis en cause. Le Siècle des lumières (de 1715 à 1789) estimait que cette démarche était contraire à la modernité, à la rationalité scientifique. Les romantiques allemands pensaient au contraire que le folklore était indispensable à l’épanouissement des peuples, qui ont besoin de racines. Quoi qu’il en soit, le folklore permet de transmettre des mythes anciens de génération en génération.

Souvent, les mythes sont réécrits et transformés pour faire sens dans le monde moderne. Ainsi, ces histoires font le pont entre les sociétés d’hier et celles d’aujourd’hui pour transmettre des idées anciennes aux jeunes générations. Par exemple, le mythe du nisse, dans Hilda, permet de parler des problèmes des sans-abri dans les grandes villes. Les modes de vie des indiens Sioux, dans Yakari, permettent de réfléchir au rapport des hommes à la nature et renvoient aux questions écologiques. 

À travers leurs modifications, les passeurs que sont les artistes font œuvre de création. En donnant une nouvelle histoire au Gibous niçois, Joann Sfar rappelle que les récits populaires que l’on nous raconte enfant sont là pour être remaniés et réinterprétés. En mêlant figures folkloriques et références à la contre-culture des monstres, Petit Vampire rappelle enfin que le folklore se développe en se distinguant de la culture dominante. Parfois, le mot « folklorique » est péjoratif et qualifie une sous-culture, étrange, différente... dont la série de Joann Sfar fait l’éloge. 

Yakari

Yakari parait pour la première fois dans la revue suisse le Crapaud à Lunettes du 12 décembre 1969. Le jeune sioux Lakota dont les premiers dessins remontent à 1964 est l’oeuvre de Claude de Ribaupierre, alias Derib et André Jobin, alias Job au scénario. En dialogue avec son époque, la série repose sur l’adage amérindien : « la terre ne nous appartient pas, elle appartient à nos enfants ». Job développe une galerie de personnages bienveillants que Derib installe dans une mise en page dynamique aux couleurs douces, une signature qu’il adapte ensuite dans Buddy Longway et Red Road. 

Yakari possède un don. Dés le premier épisode, son totem Grand Aigle lui « accorde » le pouvoir de communiquer avec les animaux. Cette originalité permet de nous faire découvrir une partie de la faune nord américaine. Outre Grand Aigle, un pygargue à tête blanche, devenu l’emblème national des États-Unis, Yakari sympathise avec le « grand chien » ou « chien sacré » dans la légende des Sioux, c’est-à-dire le cheval, ici son ami Petit Tonnerre. Sont présents les bisons (tatanka en lakota), l’animal providentiel, en particulier Ptesan Win, la femme bisonne blanche. Également acteurs, les castors, sur lesquels reposera l’existence des colonies françaises d’Amérique, mais aussi Coyote le distrait, Loup le gardien des traditions, Corbeau le malin ou encore Nanabozo le filou. 

Derrière ce récit privilégiant la poésie et le message écologiste, Job et Derib brossent le portrait documenté de la population amérindienne avant l’arrivée des colons blancs. Devenus nomades, vivant exclusivement de la chasse au bison, les Sioux sont alors les seigneurs des Plaines. À travers les aventures de Yakari, de ses amis Arc en Ciel et Graine de Bison, les auteurs revisitent le monde de l’enfance, et mettent en avant les valeurs universelles comme le courage, la tolérance et l’amitié dans un décor dédié à la Nature. Pour preuve de leur réussite, aujourd’hui certains jeunes amérindiens jouent à Yakari.

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Totémisme - Tome 1, page 27

Grand Aigle, son totem, « accorde » à Yakari le pouvoir de comprendre le langage animal. Le totem (ot-oteman en langue ojibwé) signifie la possession d’un individu par un esprit protecteur. Ce n’est pas l’animal physique qui transmet ce pouvoir, mais son esprit. Les objets en rapport avec l’animal, une plume ou une griffe, facilitent la communication. La vue de ces objets ou leur contact transmettent le pouvoir à celui qui en a reçu la vision. L’aigle est associé au courage, à la vérité et à la communication avec le Grand Esprit. Lors de discussions avec d’autres populations indiennes ou avec les Blancs, les Sioux tenaient une plume d’aigle, ce qui signifiait « Voici la vérité ».

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Le mythe du Bison - Tome 2, page 9

Dans la mythologie sioux, Bison se trouve au début du cycle, à l’Ouest, afin de retenir les eaux qui menacent la Terre, pour éviter le déluge. Bison perd un poil chaque année et un pied à chacun des quatre âges cycliques. Lorsqu’il aura perdu tous ses poils et ses quatre pieds, le cycle sera arrivé à son terme et les eaux inonderont à nouveau le monde. Bison serait aujourd’hui debout sur son dernier pied, et presque entièrement pelé.

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Coyote le distrait - Tome 12, page 47

Parfois surnommé « le vieil homme », Coyote est le maître de l’illusion, mais il tombe souvent dans ses propres pièges. S’il ne comprend pas pourquoi ses bêtises se retournent contre lui, il réussit toujours à s’en sortir. Coyote reflète nos incohérences. En multipliant les catastrophes, il devient expert en la matière. En revanche, avec ses sottises, il introduit une certaine forme d’humour dans le quotidien. Coyote est réputé pour contrecarrer les projets de Loup.

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Loup le gardien - Tome 8, page 31

Loup est le garant de la bonne entente et de l’harmonie dans la communauté. Il symbolise celui qui garde les traditions. Les loups sont organisés en meute, système dans lequel chacun remplit une fonction. Les anciens indiquent aux jeunes quelle est leur place et quel doit être leur comportement au sein du groupe. À la pleine lune, le chant des loups rappelle ces enseignements.

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Corbeau le malin - Tome 14, page 45

Dans Yakari, le corbeau s’appelle Mic-Mac, du nom d’une tribu indienne de la côte nord-est (Micmacs). C’est aussi un terme pour désigner une embrouille. Corbeau est davantage présent parmi les Indiens de la côte nord-ouest. De nombreux mythes font intervenir le puissant et malin Corbeau dans, par exemple, la naissance du jour ou l’alternance de l’été et de l’hiver. Corbeau tend des pièges, c’est l’esprit de la ruse. Considéré à la fois comme bienfaisant et mauvais, il serait noir à cause de son esprit malicieux.

Hilda

Hilda est une série de bande dessinée créée par Luke Pearson en 2010 pour la maison d’édition anglaise Nobrow. Dans ses six aventures, éditées en France chez Casterman, Hilda part à la découverte de nombreuses créatures légendaires. L’auteur, né dans le nord-est de l’Angleterre, partage avec cette série sa passion pour le folklore scandinave. Les géants, trolls, nisses et elfes peuplent ce monde aussi varié que fascinant. Les décors d’Hilda s’inspirent de paysages nordiques comme ceux de la kommune d’Odda en Norvège, sur laquelle est basée la géographie de Trollbourg, où vit l’héroïne.

Outre les légendes du Nord, Hilda puise aussi dans le folklore du monde entier, comme avec la créature du chien noir, tirée des récits britanniques, ou celle de l’oiseau-tonnerre, propre aux populations amérindiennes d’Amérique du Nord. Ce bestiaire issu de croyances ancestrales trouve une nouvelle jeunesse grâce au graphisme résolument contemporain de Luke Pearson, héritier de Tove Jansson et d’Hayao Miyazaki.

Hilda donne ainsi envie de fouiller dans les vieilles bibliothèques pour accéder à des univers disparus. Cet éloge du folklore est un appel à redécouvrir le monde, à partir en quête des créatures légendaires qui peuplent les ouvrages ancestraux. Le désir d’aventure d’Hilda fait d’elle une cousine éloignée de Finn, le personnage de la série d’animation Adventure Time, pour laquelle Luke Pearson a réalisé plusieurs storyboards.

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Les paysages - Hilda et le troll, page 11

Les récits scandinaves expliquent souvent la formation des paysages par des raisons surnaturelles. Ainsi, un rocher à la forme étrange peut s’avérer être un troll. Ces créatures nocturnes se changent en effet en pierre à la lumière du jour. Par exemple, le relief des pics Trold-Tindterne en Norvège trouverait son origine dans la pétrification de deux armées de trolls en guerre qui auraient été surprises par le soleil. Dans cette scène, Hilda dessine un rocher dans lequel elle a tout de suite reconnu un troll de pierre. L’auteur souligne ainsi à quel point les mythes, en appelant à voir le monde à travers le prisme de l’imagination, subliment le monde.

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Les géants - Hilda et le géant de minuit, page 27

Plusieurs récits populaires ont tenté d’expliquer la disparition des géants présents à l’origine du monde et leur remplacement par les créatures des traditions folkloriques plus récentes. C’est le cas de la légende du géant Borre, dont on trouve des traces au XVIe siècle, qui s’est déplacé avec sa femme afin de ne plus être dérangé par les nains. Dans l’ouvrage lu par Hilda, le conflit entre le peuple invisible et les géants a poussé ces derniers à s’envoler pour disparaître dans l’espace.

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Une question de point de vue - Hilda et le géant de minuit, page 36

La représentation des êtres minuscules, comme les elfes, pose des questions de dessin similaires à celle des êtres gigantesques, comme les géants des temps anciens. Pour faire ressentir la distance qui sépare Hilda et sa mère de ces deux mondes, le dessinateur décide de représenter les elfes et les géants dans un style minimaliste. Le peu de détails de leur visage donne en effet l’impression qu’ils sont vus de loin, le lecteur partageant le point de vue de l’héroïne. La fin du récit de Jorgen le géant révèle que son amoureuse, avec qui il avait rendez-vous, s’est endormie et transformée en montagne. Les récits des géants qui permettent d’expliquer la formation des paysages sont très courants dans les légendes scandinaves.

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Le chien noir - Hilda et le chien noir, page 1

Dans Hilda et le chien noir, une bête obscure rôde dans la ville, causant la panique des habitants de Trollbourg. Le chien noir est une créature fantomatique du folklore britannique, associée à la dépression, à la mort et au diable. Il renouvelle la symbolique morbide attribuée aux chiens, souvent représentés comme les gardiens des enfers. Ce rôle est ainsi attribué à Cerbère dans la mythologie grecque et à Garm dans la mythologie celtique. Cette légende britannique a été largement popularisée par sir Arthur Conan Doyle dans Le Chien des Baskerville. Cette aventure d’Hilda développe donc une ambiance évoquant parfois le roman à énigme du XIXe siècle, et les apparitions du chien mystérieux sont relayées dans des journaux au graphisme désuet.

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Le nisse - Hilda et le chien noir, page 13

Cette quatrième aventure marque l’apparition de Tontu, un nisse. Le nisse est, dans la culture scandinave, un esprit solitaire qui protège les fermes et ses environs. Il fait donc partie, avec le brownie écossais et le domovoï slave, de ces êtres qui veillent sur le foyer. Une des premières mentions de l’esprit de la maison remonte au XIIe siècle, dans la saga d’Olaf Tryggvason. Les légendes qui tentent d’intégrer ces personnages folkloriques dans un contexte chrétien en font des anges déchus, tombés sur le toit des maisons. Dans Hilda et le géant de minuit, les pages des vieux livres présentant les géants de jadis font des nisses les descendants du géant mal-aimé Björg. Dans Hilda et le chien noir, Tontu est un nisse banni de son foyer, accusé à tort d’avoir cassé de nombreux objets de la maison dans laquelle il vivait. Lorsque Hilda le croise pour la première fois, elle se demande s’il ne souffre pas du froid et s’il n’a pas faim. En plaçant ces esprits domestiques hors de chez eux, l’auteur appelle à ne pas rester indifférent à la situation des personnes qui vivent dans la rue.

Petit Vampire

Petit Vampire est une série créée par Joann Sfar en 1999. Après sept volumes aux éditions Delcourt, une série d’animation et plusieurs recueils de nouvelles, elle connaît une nouvelle jeunesse aux éditions Rue de Sèvres avec une trilogie dont le dernier volume est paru en 2019. Revenant sur les origines de cet univers, ce récit met en scène la plongée d’un petit garçon orphelin, Michel, dans le monde merveilleux des monstres. Pour pouvoir vivre pleinement son amitié avec Petit Vampire, il devra lutter contre l’affreux Gibbous, qui menace le monde des morts-vivants depuis des siècles. 


L’univers de Petit Vampire s’abreuve de récits de tous horizons, refusant les hiérarchies entre les genres, et fait le grand écart entre le Nosferatu de Murnau et les Peanuts de Schulz. Ce mélange invite d’abord le lecteur à considérer l’imagerie populaire comme un immense terrain de jeu, comme la chambre de Michel, où se mêlent figurines de monstres « Aurora » et pirates « Playmobil ». Véritable invitation à la curiosité intellectuelle, la série interroge également la place des mythes et légendes dans la constitution de l’identité. Le monstre apparaît comme une figure dans laquelle un enfant comme Michel, à la famille atypique, peut se reconnaître et trouver une forme de normalité et de force. Découvrir Petit Vampire, c’est donc lire une grande déclaration d’amour aux récits de genre, un appel bienveillant à plonger dans l’imaginaire pour mieux affronter le monde.

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Le Hollandais volant - Petit Vampire tome 1, planche 5

Pandora, sur le point de se faire assassiner par un amoureux éconduit, lance un appel : elle offrira sa vie à qui sauvera son enfant. Le Capitaine des morts vient alors les aider, leur évitant une mort certaine. Mais il les transforme en mort-vivant. L’ouverture de Petit Vampire trouve sa source dans les légendes de vaisseaux fantômes, et plus précisément dans celle du Hollandais volant telle qu’elle apparaît dans le film Pandora d’Albert Lewin (1951). L’apparition des monstres, squelettes, fantômes, est ainsi loin d’être effrayante. Au contraire, ces créatures symbolisent la délivrance. A l’image des pirates, qui affichent sur leur pavillon une tête de mort, l’histoire de Petit Vampire ne cesse de souligner le caractère protecteur des figures macabres. Comme si, en se rapprochant de la mort, on la conjurait. Voici commence Petit Vampire, grand éloge de la monstruosité.

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Le Gibbous - Petit Vampire tome 1, planche 28

Le Gibbous est inspiré de la chanson niçoise Lou Gibbous, qui raconte l’histoire d’un bossu. Madelon, pour lui faire payer de l’avoir trop regardé, décide de lui couper la bosse, mais finit par avoir trois enfants bossus. Le Gibbous de Joann Sfar, quoique malheureux en amour, a une histoire personnelle très différente. Le Prince qu’il était, suite à l’échec de sa tentative d’épouser Pandora, en vient à pratiquer un culte démoniaque. Son beau visage laisse place à un croissant de lune, qui, contrairement à ce que son nom indique, n’est pas gibbeuse. Il s’entoure alors de toute une armée de « kawaii » (« mignon » en japonais), des hommes qu’il met à son service en les transformant en blattes adorables. Cette rencontre du folklore niçois et de la figure japonaise du kawaii est typique de l’appétit de Petit vampire pour la culture populaire du monde entier.

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Les monstres - Petit Vampire tome 2, planche 12

Les monstres qui entourent Petit Vampire ont tous des histoires familiales tragiques, qu’il s’agisse de Marguerite, qui a des airs de monstre de Frankenstein, de Claude, le crocodile mutant, ou d’Ophtalmo, le résultat d’une mauvaise expérience nucléaire. La rencontre entre Michel et Marguerite met en évidence leur ressemblance, évoquant tous deux le monde de Charlie Brown et Snoopy, avec leur nez entre les yeux et leur tête à forme ovale. Véritable double de Michel fantasmé en monstre de Frankenstein, Marguerite montre ainsi que les figures populaires forment une matière dans laquelle on est invité à se projeter pour forger notre identité.

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Mondes effrayants - Petit Vampire tome 2, planche 17

Ce type de scène, où le personnage, horrifié, se réfugie dans un lieu encore moins rassurant que celui où il se trouvait, intervient souvent dans les histoires effrayantes. On la retrouve par exemple dans le cartoon Minnie the Moocher des Frères Fleischer, où Betty Boop et Bimbo se réfugient dans une grotte peuplée de spectres et autres monstres. Ici, Michel se retrouve dans un marécage où il imagine diverses créatures qui semblent tout droit venir de Swamp Thing, la créature des marais, adapté en bande dessinée par Len Wein et Bernie Wrightson.

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Le Capitaine des morts - Petit Vampire tome 2, planche 20

Lorsque Michel rencontre le Capitaine des morts pour la première fois, ce dernier se pare d’un visage humain afin de ne pas effrayer le petit garçon. Néanmoins, son perroquet squelette, ses yeux rouges, et les tentacules de pieuvre qui l’entourent comme des volutes de fumée, créent une ambiance inquiétante. Mais Michel, qui adore les récits de pirates, n’a pas peur. Les mythes et légendes semblent nous préparer aux rencontres les plus insolites. Le style réaliste du Capitaine des morts, qui évoque les personnages les plus charismatiques d’Hugo Pratt et de Jordi Bernet, tranche avec celui de Michel, plus proche du Charlie Brown de Charles M. Schulz. Ce contraste, signe du refus des hiérarchies entre les genres, participe de la richesse de cette rencontre.

Naruto

Naruto est un manga créé par Masashi Kishimoto pour le magazine Shōnen Jump en 1999. Sur 72 volumes, la série détaille le parcours d’un jeune orphelin dans lequel a été scellé un terrible démon qui menace à tout moment de se réveiller. Cette malédiction condamne l’enfant à une vie de solitude au sein du village ninja de Konoha.

Le monde de Naruto, pacifié, est encore meurtri par les guerres récentes. Il rappelle le Japon féodal, avec une paix très instable et des alliances qui se font et se défont facilement. L’univers de Naruto développe également une dimension fantastique qui fait appel à de nombreuses mythologies et religions d’Asie. Comme pour la force dans La Guerre des étoiles, les protagonistes principaux sont des ninjas animés par une puissance spirituelle appelée « chakra ». Elle leur permet d’utiliser un éventail de techniques de combat différentes d’un héros à l’autre. L’apparence de ces ninjas s’éloigne des stéréotypes du Japon féodal. En effet, autour de ce socle, s’ajoutent de nombreuses références aux systèmes de croyance shintoïste, bouddhiste, taoïste et hindouiste.

Lire Naruto, c’est donc s’amuser mais également s’initier assez intelligemment à de nombreuses notions philosophiques d’Asie. L’exposition présente ici quelques références liées à l’Histoire du Japon, sa littérature et certaines de ses religions.

Naruto a été prépublié au Japon dans l'hebdomadaire Weekly Shōnen Jump des éditions Shūeisha entre septembre 1999 et novembre 2014. La série a été compilée en 72 tomes. La version française du manga est disponible aux éditions Kana depuis mars 2002.

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Le Godai - Tome 35, page 113

Le manga Naruto évoque souvent le godai, l’ensemble traditionnel japonais des cinq éléments inspiré de la version bouddhiste du concept. Les ninjas de la série ont recours à diverses techniques dont le ninjutsu, qui consiste à changer la nature du chakra d’un ninja en l’un des cinq éléments. Le feu permet l’utilisation de techniques katon, le vent du fūton, la foudre du raiton, la terre du doton et l’eau du suiton.

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Le Multiclonage - Tome 1 page 54-55

Le multiclonage est l’une des techniques favorites de Naruto. C’est une variante du clonage de l’ombre qui ne produit qu’une seule copie du combattant à l’aide de son chakra. Ici, l’utilisateur crée plusieurs doubles et le chakra est réparti équitablement entre eux. Ils sont alors dotés d’une fraction de la puissance du créateur original.

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Kusanagi - Tome 43, page 54

Épée japonaise légendaire, Kusanagi est aussi célèbre qu’Excalibur en Angleterre ou Durandal en France. Selon la légende, elle proviendrait de la queue d’un dragon à huit têtes, tué par Susanoo, qui l’aurait ensuite donnée à sa sœur Amaterasu pour se faire pardonner. Dans Naruto, Orochimaru possède l’épée Kusanagi (qui a la réputation d’être plus solide que le diamant). Il s’en est servi pour tuer le troisième Hokage lors de l’examen final des chūnin (grade supérieur chez les ninjas). Dans l’affrontement entre Itachi et Sasuke, lorsque ce dernier est à court de chakras, Orochimaru refait surface. Et la scène rejoue le combat mythologique entre Susanoo et Yamata no orochi, le dragon.

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Tsukuyomi - Tome 16, Pages 146-147

Dans Naruto, Tsukuyomi (littéralement Arcanes lunaires) est une technique maîtrisée par certains Uchiwa qui permet d’emprisonner son adversaire dans un monde virtuel où il se trouve totalement à sa merci. Une version plus avancée, le Mugen Tsukuyomi, permet de refléter son œil sur la lune pour plonger tous les êtres vivants dans une illusion éternelle. Cette technique très puissante fait référence au nom du dieu de la lune et de la nuit dans le shintoïsme et la mythologie japonaise, frère d’Amaterasu et de Susanoo.

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Kyūbi no yōko - Tome 43 pages 180-181

Ce démon, ou bijū, est le plus important. Il a été scellé dans le corps de Naruto alors qu’il n’était qu’un enfant. Son nom et son apparence font référence à l’une des créatures les plus redoutées de la mythologie asiatique : le renard à neuf queues. Plutôt bienveillant dans le folklore nippon, il est considéré dans le reste de l’Asie comme une créature maléfique. Et comme l’esprit dont il est inspiré, Kyūbi est puissant, manipulateur et il possède de nombreuses formes qui affectent Naruto physiquement.