NINE ANTICO CHAMBRE AVEC VUE
Remarquée par le Festival d’Angoulême dès son premier album, Le Goût du Paradis, en lice pour le prix Révélation en 2009, distinguée deux ans plus tard avec deux titres retenus en Sélection Officielle, Coney Island Baby et Girls don’t cry et de nouveau en sélection cette année avec l’album Madones et Putains, Nine Antico fait de l’Hôtel Saint-Simon son espace idéal, entre petit théâtre de l’intime et paysages fantasmés.
Nine Antico est entrée dans le monde de la bande dessinée par le tumulte joyeux et foutraque des salles de concert parisiennes. Amatrice d’indie rock, elle jette ses croquis sur carnet debout face à la scène, son geste soumis aux élans du public et aux pulsations des caissons de basses. Quand elle n’offre pas ses dessins aux musicien·ne·s en fin de concert, elle les réunit dans un fanzine, Rock This Way, dont elle autoédite une poignée de numéros au début des années 2000.
Autodidacte revendiquée, Nine Antico est aujourd’hui l’autrice d’une dizaine d’albums dans lesquels elle explore un large spectre de genres, de l’autobiographie à la biographie romancée, en passant par l’album jeunesse et la bande dessinée érotique. Cette enfant des années 1980, nourrie d’images et d’icônes de la pop culture américaine, se plaît à convoquer les références et à varier les tons dans ses livres comme à l’écran. Au coeur de son scénario : les femmes, dans tous leurs états. Petites ou jeunes filles, pin-up ou actrices pornos, amoureuses éperdues, rêveuses ou désillusionnées, seules, en duo ou en trio, groupies ou amazones, observatrices ou sujets de tous les regards, madones ou putains, mais toujours farouchement drôles et touchantes.
À travers près de 200 pièces (carnets, fanzines, archives personnelles, storyboards, etc.), dont une centaine d’originaux, l’exposition présente la richesse d’une oeuvre où se répondent sans cesse légèreté et gravité. Les portes de l’Hôtel Saint-Simon s’ouvrent sur la vision fantasmée d’un rêve américain, dont les héroïnes d’Antico sont autant les victimes que les pourfendeuses, avant de plonger dans la naissance d’un style multiforme, entre traits rageurs, noir et blanc et couleurs, carnets et fanzines. À l’étage, un retour à l’enfance et à l’adolescence fait la part belle aux teintes pastel ou acidulées, aux résonances photographiques et à la construction d’un décor intime qui déborde du cadre jusqu’à s’imprimer sur grand écran. La dernière pièce, italienne et éruptive, entièrement consacrée à Madones et Putains, révèle un dessin tenté par l’inachèvement, son risque et sa beauté.
