MASAAKI YUASA & TAIYŌ MATSUMOTO, L’ART DE INU-OH
Depuis le flamboyant Mind Game (2004), long métrage adapté du manga du même nom de Robin Nishi, le réalisateur Masaaki Yuasa a su imposer une personnalité unique dans le paysage formaté de l’animation japonaise. Son obsession du mouvement et des lignes aériennes, son goût de la narration gigogne et sa poésie psychédélique ont scellé la cohérence d’une œuvre indomptable saluée par les plus prestigieux festivals du monde entier. En recherche constante de nouvelles formes, Masaaki Yuasa revendique une liberté de création palpable dans tous ses choix : papillonnant d’un univers à l’autre, capable de jouer les caméléons dans la fiction américaine (il réalise en 2014 un épisode d’ADVENTURE TIME), les artificiers pour quelques productions du cru (il participe à l’aventure sérielle Space Dandy, pilotée par Shin’ichirō Watanabe), d’adapter des romans à succès (la série The Tatami Galaxy et le film Night is Short, Walk On Girl, tous deux inspirés des travaux de Tomihiko Morimi ; Japan Sinks : 2020, qui revisite La Submersion du Japon de Sakyō Komatsu), d’embrasser des monuments du manga d’hier (le show Netflix DEVILMAN crybaby, tiré de l’œuvre sulfureuse de Gō Nagai) et d’aujourd’hui (PING-PONG THE ANIMATION, brillante adaptation du drame sportif de Taiyō Matsumoto), le réalisateur – également cofondateur du studio Science SARU – est définitivement un électron libre dont chaque nouveau projet attise curiosité et impatience.
Après deux longs métrages sortis dans les salles françaises en 2017 et 2021 (les très beaux Lou et l’île aux sirènes et Ride Your Wave), le réalisateur revient avec INU-OH, un récit d’époque qui s’inspire du roman Le Roi chien de Hideo Furukawa, figure phare de la littérature japonaise contemporaine que d’aucuns considèrent comme le fils spirituel de Haruki Murakami. L’histoire de INU-OH s’attache au parcours d’un garçon traité de monstre (le mal nommé « Inu-Oh »), né avec une difformité physique qui l’oblige à se camoufler sous un masque en forme de gourde et quelques morceaux d’étoffes bariolées. Mais sa rencontre avec Tomona, un jeune joueur de biwa (instrument à cordes comparable au luth) aveugle, va changer son quotidien : transcendé par la musique, Inu-Oh va entamer une lente mutation à mesure qu’il illustre par la danse les chansons de son comparse. Une complicité se déploie alors entre les deux parias, qui deviennent au fil de leurs représentations publiques les nouvelles coqueluches d’une population locale galvanisée par leur énergie scénique. Deux « rock stars » sont nées, en plein XIVe siècle !
Projeté en avant-première française au Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême, après des passages remarqués à la Mostra de Venise et à Toronto, INU-OH s’accompagne d’une exposition qui dévoile les coulisses de sa conception. De la création des personnages dessinés par Taiyō Matsumoto (qui signe également l’affiche du film) aux dernières étapes de la finalisation, L’Art de INU-OH offre un point de vue riche et documenté sur une œuvre singulière, qui réunit les plus grands talents du cinéma japonais et du manga.
Avec le soutien de l'Ambassade du Japon en France.