Hommage à Raoul Cauvin, scénariste des tuniques bleues et de l'agent 212
C'est avec une grande tristesse que le Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême a pris connaissance du décès de Raoul Cauvin, survenu le jeudi 19 août 2021, après une longue maladie. Pilier du journal Spirou durant des décennies, le scénariste avait créé plusieurs séries restées dans les annales du 9e art, parmi lesquelles Les Tuniques bleues, L'Agent 212, Les Femmes en blanc, ou encore Cédric. Le monde de la bande dessinée vient de perdre l'un de ses vétérans, qui avait excellé dans une discipline en particulier : le gag.
Né le 26 septembre 1938 à Antoing, en Belgique, Raoul Cauvin se forme durant cinq ans à la lithographie publicitaire, à l'Institut Saint-Luc de Tournai. Avant de découvrir, une fois diplômé, que cette profession était entre-temps tombée en désuétude ! Il enchaîne alors les petits boulots, notamment dans une usine de boules de billard ; un jeu pour lequel il aura toute sa vie gardé une véritable passion.
En 1960, sa carrière prend un tournant décisif, lorsqu'il entre aux éditions Dupuis. Il est d'abord lettreur, puis reste durant sept ans cameraman au département « Dessins animés ». Dans le même temps, il s'essaye au scénario, avec le soutien de Charles Dupuis en personne. Il collabore avec Charles Degotte, Eddy Ryssack, Serge Gennaux, et surtout Claire Bretécher, avec qui il crée Les Naufragés. Si ces premières expériences n'obtiennent qu'un succès d'estime, Raoul Cauvin s'apprête alors à lancer la série qui fera de lui l'un des plus grands noms de la bande dessinée franco-belge.
En 1968, alors que Lucky Luke est désormais publié dans Pilote, Raoul Cauvin et Louis Salvérius lancent Les Tuniques bleues, un western parodique et antimilitariste se déroulant dans le cadre de la Guerre de Sécession. Cette fois, le succès est au rendez-vous, que vient cependant ternir la mort précoce de Salvérius, en 1972. C'est Willy Lambil qui lui succède. Depuis, les mésaventures de Blutch et Chesterfield se sont vendues à plus de quinze millions d'exemplaires.
Par la suite, Raoul Cauvin multiplie les collaborations, notamment avec Berck (Sammy et Lou), Macherot (Mirliton), Walthéry (Le Vieux bleu), Kox (L'Agent 212), Bercovici (Les Femmes en blanc), Hardy (Pierre Tombal), Glem (Les Voraces), Laudec (Cédric et Taxi Girl), ou encore Bédu (Les Psys). Avec Nic, il reprend également Spirou et Fantasio au début des années 1980. Si certains de ses scénarios se présentent sous la forme d'histoires longues, Raoul Cauvin s'impose surtout très vite comme un gagman hors-pair. Il s'illustre tant dans un registre grand public, qu'avec un humour plus incisif, inventant et réinventant sans cesse les éléments d'une mécanique qu'il maîtrise à merveille.
« Le divan, c'est mon outil de travail. Dans presque toutes les pièces de la maison, il y en a un, ou quelque chose qui lui ressemble », expliquait Raoul Cauvin lorsqu'on lui demandait d'évoquer sa méthode de travail, qui lui a permis de publier jusqu'à 15 albums par an, au plus fort de sa carrière. Récompensé du Prix du scénariste étranger au Festival d'Angoulême en 1976, Raoul Cauvin avait également été auréolé du Grand Prix Saint-Michel, pour l'ensemble de son œuvre, en 2008.
Exposition Les Tuniques Bleues avec L'Unicef, en 2010, au Festival d'Angoulême